Richard Fuller est le président de Pure Earth, qui assure le secrétariat de la Global Alliance on Health and Pollution (GAHP) (a). Institut sans but lucratif, Pure Earth œuvre à la décontamination de sites dans les communautés les plus démunies des pays à revenu faible et intermédiaire, où les concentrations importantes de toxines ont des effets désastreux sur la santé. Le consortium GAHP, qui contribue à mettre des moyens techniques et financiers à la disposition des gouvernements et des communautés pour réduire les conséquences sanitaires de la pollution dans les pays à revenu faible et intermédiaire, a vocation à sensibiliser les gens à toutes les formes de pollution toxique.
1) Qu’entend-on par « pollution toxique » ?
Richard Fuller (RF) : l’expression « pollution toxique » désigne une eau, un sol ou un air contaminé, qui devient de ce fait nuisible ou délétère. Cela recouvre les rejets industriels (métaux lourds des mines ou produits chimiques des usines) ainsi que les égouts et les particules provenant des centrales électriques. L’adjectif « toxique » permet de différencier cette pollution de celle découlant d’une hausse des niveaux de dioxyde de carbone, à l’origine du changement climatique mais sans effets directs sur la santé.
Des polluants toxiques peuvent empoisonner l’eau potable, le poisson des cours d’eau et des étangs, les plantes cultivées sur des terres contaminées mais aussi les aires de jeux, les lieux d’habitation et l’air que nous respirons. Le fait de vivre sur un site pollué vous expose à ces poisons à chaque fois que vous mangez, buvez, respirez, jouez ou faites votre toilette.
La pollution toxique est la première cause de mortalité dans le monde (a) et pourtant, c’est l’un des enjeux d’envergure internationale les moins bien étudiés et financés.
2) Comment la pollution toxique affecte-t-elle la santé publique ?
RF : la pollution a de nombreuses formes et peut rejaillir sur la santé humaine de multiples façons, parfois d’une manière qui n’est pas immédiatement perceptible. C’est pourquoi certains parlent de « tueur invisible » à propos de la pollution toxique.
Il arrive souvent que l’on attribue à une autre cause une maladie engendrée par l’exposition à la pollution toxique. Et dans bien des cas, le poison s’accumule et entraîne des lésions corporelles que l’on mettra des années à déceler. Les femmes et les enfants sont particulièrement exposés.
La pollution peut entraîner des malformations congénitales, des retards de développement et des troubles neurologiques irréversibles, sans parler des atteintes au système immunitaire. Elle est notamment responsable de nombreux cancers et de maladies cardiaques et pulmonaires. Comparativement, c’est une cause de mortalité bien plus importante que n’importe quelle autre. Elle touche souvent des communautés entières et freine la croissance économique en plus de dégrader les ressources naturelles et humaines.
3) Combien de personnes sont victimes de la pollution toxique ? Quelles sont les régions du monde les plus touchées ?
RF : on estime que plus d’un décès sur sept dans le monde est lié à la pollution. Pour ne parler que des sites contaminés, la pollution toxique détériore la santé de plus de 200 millions d’êtres humains. La pollution atmosphérique en ville touche un nombre encore plus élevé de personnes. Globalement, la pollution tue trois fois plus (pdf) (a) de gens que le VIH, le paludisme et la tuberculose réunis.
L’essentiel de son impact concerne les pays à revenu faible et intermédiaire : en 2012, l’exposition à un sol, une eau et un air pollués (à l’intérieur et à l’extérieur) y a provoqué 8,4 millions de décès. Cela représente 94 % de la charge de morbidité induite par la pollution, alors même que les pays les plus touchés sont eux aussi les moins bien équipés pour s’atteler à ce problème. Les pauvres empoisonnés (pdf) (a) n’ont pas les moyens de partir ou de décontaminer leurs lieux de vie, de sorte qu’ils paient un tribut sanitaire particulièrement lourd.
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