Comment la loi veut responsabiliser les entreprises françaises
Par Solène Cordier
Près de deux ans après le drame du Rana Plaza au Bangladesh, au cours duquel plus d’un millier d’ouvriers travaillant pour des sous-traitants de multinationales sont morts dans l’effondrement de leur usine, les députés ont adopté, lundi 30 mars, un texte instaurant un « devoir de vigilance » pour les entreprises françaises à l’égard de leurs sous-traitants.
Lire notre enquête : Un an après le drame du Rana Plaza, la sécurité des usines bangladaises ne s’est pas améliorée
Que dit la proposition de loi ?
La dernière mouture du texte, porté par des députés socialistes et Verts, crée une obligation pour les entreprises transationales de montrer qu’elles agissent pour limiter les risques liés à leur activité, y compris chez leurs sous-traitants étrangers. Cette attention se traduira par la rédaction d’un « rapport de vigilance » dont les contours seront précisés dans un décret. Il devrait fournir un mode d’emploi pour les entreprises, qui devront notamment « cartographier les risques » auxquels elles s’exposent, et mettre en oeuvre des moyens pour y remédier.
« Des moyens mutualisés seront mis en place, comme des audits communs à une filière ou un territoire », précise le socialiste Dominique Potier, un des rapporteurs du texte.
Le texte est né du constat, dressé depuis plusieurs années par de nombreuses ONG, que, dans une économie mondialisée, le recours à une sous-traitance délocalisée dans des pays où la main-d’œuvre est la moins chère est devenue la norme, et ce au détriment de règles minimum de sécurité et de respect des travailleurs.
Cette loi crée de fait un devoir de responsabilité des entreprises, qui fait suite à plusieurs scandales, comme celui du Rana Plaza qui a fortement marqué l’opinion française, en raison de l’implication d’entreprises françaises. « Ce texte signe la fin de l’impunité et crée une régulation nécessaire », se félicite Dominique Potier.
Une fois la loi promulguée, les sociétés mères devront s’assurer que les fournisseurs avec lesquels elles « entretiennent une relation commerciale établie » respectent le droit syndical local, ne recourent pas au travail des enfants, disposent de conditions de sécurité correctes… qu’elles respectent en somme un ensemble de principes en matière de droits humains déjà édictés dans plusieurs textes internationaux comme les Principes directeurs de John Ruggie.
Qui sera concerné ?
Le panel finalement retenu, sur proposition du gouvernement, concerne les très grandes entreprises françaises : celles qui emploient plus de 5 000 salariés en France ou plus de 10 000 en France et dans le monde. Selon Dominique Potier, cela représente 150 à 200 entreprises.
Le Monde.fr |
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